Les franciliens produisent un peu plus de 30% du PIB national dans une économie hautement tertiaire et dépendante de ses ressources humaines. Ils représentent également près de 20% de la population et se concentrent sur 2% du territoire national. Ces quelques statistiques montrent que la métropolisation n'est pas un vain mot pour les franciliens. Alors qu'il s'agit d'un phénomène de fond global, pour les habitants de l'Ile-de-France elle se manifeste souvent de manière négative dans leur quotidien, dans les prix des logements, les difficultés de transport ou encore la pollution.
Alors que les régions connaissent une attractivité renouvelée en mettant en avant leur qualité de vie, les franciliens sont-ils si mécontents de leur sort et aspirent-ils vraiment à quitter la région ? Comment aimeraient-ils se loger et comment se projettent-ils dans 10 ans après la livraison du Grand Paris Express ?
JLL en partenariat avec l'institut CSA a conduit une enquête auprès des franciliens pour connaître leur parcours résidentiel, leurs attentes en matière de logement aujourd'hui et dans le futur. Cette enquête a été réalisée auprès d'un échantillon de 1 008 habitants de la région, âgés de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Un questionnaire en ligne auto-administré a été conduit entre le 25 mars et le 3 avril 2019.
71% des sondés vivent en Ile-de-France par choix et non par contrainte et 85% en sont satisfaits.
« Ces premiers chiffres sont rassurants pour l'attractivité de l'Ile-de-France mais ils appellent toutefois un peu de nuance » tempère Virginie Houzé, Directeur Etudes et Recherche France de JLL. « En effet, pour la majorité des franciliens, le choix de vivre en Ile-de-France est d'abord lié à un ancrage familial historique (38% ont toujours vécu dans la région) ou un choix professionnel (28% des sondés). La motivation personnelle à vivre dans une métropole comme le Grand Paris, ne représente que 19% des réponses ».
Cette notion de choix est très variable selon les générations et les lieux de vie :
les plus jeunes et les plus âgés ainsi que les parisiens, expriment plus nettement cette dimension choisie que les classes d'âges intermédiaires, les familles ou les habitants de la périphérie.
Cet écart entre les différentes couches de la population se retrouve dans le niveau de satisfaction exprimé. « Le niveau de satisfaction moyen est juste au-dessus de la moyenne avec une note de 6,7 sur 10. » commente Virginie Houzé. « De nouveau on trouve des écarts entre les différentes parties de la population. Cela doit nous alerter puisque les catégories les moins satisfaites se situent par exemple au sein des familles et des 35-49 ans - qui constituent une part importante des effectifs en emploi et des consommateurs de la région. » D'ailleurs, il est un chiffre qui ne ment pas : quand on pose la question sur ce qui pourrait les inciter à déménager, le 1er motif évoqué par les sondés est « Quitter l'Ile-de-France » à hauteur de 36% des réponses et de 47% chez les familles. Cela peut donner matière à réflexion. Pourquoi les familles et les classes d'âge intermédiaires manifestent-elles un tel écart de satisfaction par rapport à la moyenne et un tel appétit pour vivre ailleurs ? « Cet écart s'explique assez facilement quand on creuse le parcours résidentiel de ces catégories et cela peut se résumer en un mot : contrainte. » explique Virginie Houzé. « Les actifs, qui sont aussi des familles, doivent concilier contraintes professionnelles et familiales, des temps de transport longs et une contrainte financière très significative en ce qui concerne leur logement. Cela rend d'autant plus stratégique toute démarche qui viserait à faire évoluer les modes de logement, les conditions d'accès à la propriété et faciliter les déplacements. Le Grand Paris, tel qu'il a été imaginé à l'origine, porte une partie des réponses.»
Que veulent les franciliens pour se loger ? Si la qualité de vie et de l’environnement est le 1er critère de choix du lieu résidence, les franciliens sont également très ouverts à l’innovation. Plus de 80% des sondés sont intéressés par des aménagements en lien avec le développement durable et la nature comme la présence de bornes de recharge pour véhicules électriques, la présence de jardins privatifs ou partagés et d’espaces extérieurs. Ces attentes sont en phase avec les évolutions de la société actuelle et démontrent la nécessité pour les collectivités et les promoteurs de travailler ensemble pour ne pas se contenter de produire des mètres carrés.
Alors que le logement a peu évolué pour accompagner les changements de la société, de nouveaux formats résidentiels trouvent une réponse favorable auprès des sondés. Les résidences avec services intégrés provoquent un écho très positif puisque de 55 à 70% des franciliens y voient un intérêt et s’imaginent y vivre. Certains formats existent déjà à l’étranger comme le condominium - qui propose une grande variété de services (conciergerie, salle de sport, buanderie commune, espaces de détente et de réception) - fait tout particulièrement recette puisque plus de 60% des sondés s’imaginent y vivre. Les Résidence Services Sénior - qui ne sont pas des maisons de retraite - sont également très bien reçues par les franciliens et près des 2/3 des plus de 50 ans s’y projettent. Les Résidences Services Etudiantes - qui ne sont pas des internats ni des CROUS - attirent également l’intérêt de 60% des parents d’étudiants et des étudiants eux-mêmes. « A la différence de l’immobilier traditionnel, ces offres résidentielles alternatives ont été conçues pour répondre aux besoins spécifiques de leur clientèle cible : faciliter la vie quotidienne des familles urbaines en leur apportant des services dans l’immeuble ; offrir des biens adaptés aux besoins spécifiques des séniors que l’on parle de la configuration des espaces ou de la présence de personnel ; fluidifier le parcours résidentiel rythmé par les années universitaires des étudiants en leur proposant un contrat et des services adaptés… c’est cette valeur-ajoutée spécifique qui permettra à ces offres de se développer sur le marché résidentiel » commente Virginie Houzé.
Comment les franciliens veulent-ils se loger ? 40% des locataires souhaitent accéder à la propriété dans les 5 ans mais la contrainte financière demeure le 1er frein à la mobilité en Ile-de-France (39% des sondés renonceraient à un déménagement en raison de contraintes financières). Dans un contexte de très forte pression de la demande et d’une non moins forte contrainte géographique, la hausse des prix semble inéluctable avec pour conséquence une exclusion d’une part croissante de la population de l’accession à la propriété. Pour autant, des solutions innovantes sont en train d’apparaître pour redonner de la solvabilité en partant d’un constat simple :
pourquoi acheter pour une durée infinie qui va au-delà de notre espérance de vie et pourquoi ne pas acheter un bien pour une durée définie dans le temps afin de le payer moins cher ?
« Ce type d’approche vient toucher à des sujets qui vont bien au-delà du simple calcul économique et les réponses mettent en lumière la difficulté qu’éprouvent les sondés à sortir de l’approche patrimoniale traditionnelle où l’immobilier est un objet que l’on transmet : plus de 40% des sondés refusent catégoriquement l’idée d’un bien dont la propriété s’éteindrait automatiquement à leur décès. » commente Virginie Houzé. Dès lors que les solutions proposées contournent ce sujet de la transmission - comme une propriété dont la durée est fixée à l’avance et qui peut être transmise aux héritiers - l’opposition de principe recule. Si le niveau d’adhésion de départ est encore moyen (25% de réponses positives) il existe une vraie réserve auprès de ceux qui ont besoin de pédagogie (38% de savent pas répondre ou ne comprennent pas le concept) et surtout auprès des jeunes générations qui sont beaucoup plus ouvertes à ces démarches.
Où les franciliens veulent-ils vivre dans le Grand Paris ? 75% des franciliens sont susceptibles de quitter leur département de résidence pour s’installer ailleurs. Toutefois, cette mobilité n’est pas sans condition puisque dans la grande majorité des cas le mouvement serait vers le département voisin. « Dans une région jeune où une majorité des couples sont bi-actifs et où les temps de transports sont longs, il est toujours difficile d’envisager un mouvement radical. Les franciliens essaient autant que possible de limiter les impacts sur leur équilibre familial. » précise Virginie Houzé. La promesse de développements immobiliers ou de l’arrivée d’une gare du Grand Paris Express n’ont qu’un impact limité sur les choix des franciliens et ne viendront pas bouleverser les équilibres existants. « Les départements les plus recherchés, sont ceux qui bénéficieront le plus de l’effet Grand Paris Express. L’arrivée d’un nouveau transport n’est pas suffisante pour faire changer l’opinion que les habitant peuvent avoir sur certaines communes. En outre, les franciliens - très dépendants des transports - ont une capacité limitée à anticiper sur l’arrivée d’une nouvelle ligne. 80% d’entre eux n’iraient s’installer dans une commune nouvellement desservie qu’au maximum 2 ans avant l’arrivée d’une nouvelle ligne. » conclue Virginie Houzé.
La lecture de cette enquête met en lumière l’inconfort que peuvent subir les franciliens dans leur parcours résidentiel et leur vie quotidienne. Ces contraintes nourrissent une aspiration au départ pour nombre d’entre eux et fait toucher du doigt les limites de la métropolisation dans les conditions où elle se développe. Toutefois, les franciliens sont ouverts à l’innovation, à de nouvelles propositions résidentielles et même à la manière dont ils pourraient accéder à la propriété. Ces pistes doivent être creusées conjointement par l’ensemble des acteurs de ce secteur : les collectivités qui ont un rôle à jouer sur la qualité de l’espace urbain, les promoteurs et investisseurs privés dans la manière dont ils conçoivent leur offre immobilière et la manière dont ils la proposent au public.
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